Si vous pénétrez dans le bureau de Mme Bai, regardez un peu ses étagères, vous verrez qu’elles sont envahies de divers dictionnaire. Si vous interrogez des linguistes sinophiles, vous découvrirez que leurs bureaux le sont de même. Si vous lisez l’article de David Moser, un peu résigné vis-à-vis de l’apprentissage du chinois, vous y découvrirez ceci :
One of the most unreasonably difficult things about learning Chinese is that merely learning how to look up a word in the dictionary is about the equivalent of an entire semester ofsecretarial school. When I was in Taiwan, I heard that they sometimes held dictionary look-up contests in the junior high schools. Imagine a language where simply looking a word up in the dictionary is considered a skill like debate or volleyball! Chinese is not exactly what you would call a user-friendly language, but a Chinese dictionary is positively user-hostile.
Chinese must also be one of the most dictionary-intensive languages on earth. I currently have more than twenty Chinese dictionaries of various kinds on my desk, and they all have a specific and distinct use. There are dictionaries with simplified characters used on the mainland, dictionaries with the traditional characters used in Taiwan and Hong Kong, and dictionaries with both. There are dictionaries that use the Wade-Giles romanization, dictionaries that use pinyin, and dictionaries that use other more surrealistic romanization methods. There are dictionaries of classical Chinese particles, dictionaries of Beijing dialect, dictionaries of chéngyǔ (four-character idioms), dictionaries of xiēhòuyǔ (special allegorical two-part sayings), dictionaries of yànyǔ (proverbs), dictionaries of Chinese communist terms, dictionaries of Buddhist terms, reverse dictionaries... on and on. An exhaustive hunt for some elusive or problematic lexical item can leave one's desk "strewn with dictionaries as numerous as dead soldiers on a battlefield."
Aujourd’hui, je vous propose quelques outils pour d’une, faire rentrer les 36 dictionnaires de Mme Bai ou de David Moser dans une paume de la main, de deux, ne plus apprendre comment chercher un mot dans un dictionnaire chinois… Les solutions d’appellent Wenlin et Pleco, supports électroniques valables sur ordinateur pour le premier, sur téléphone pour le second. Mais intéressons-nous préalablement à deux dictionnaires particulièrement populaires parmi la communauté sinophile.
ABC : Dictionnaire Chinois-Anglais, un magnifique travail qui résulte d’un travail d’une vie du sinologue John DeFrancis. Le nombre d’entrée est très large, les traductions précises, les distinctions toujours présentes. Il recense notamment nombres d’expressions modernes, d’expressions très orales pékinoises, ou d’expressions d’autres dialectes chinois. Les expressions techniques sont aussi présentes, scientifiques (pas mal pour comprendre les cours de sa majeure) comme linguistiques (car le chinois, c’est un peu notre deuxième majeur à tous). Pas mal de termes bouddhistes aussi, sans oublier un grand nombre de chengyu et quelques xiehouyu.
规范词典 GF : Pour les initiés, le meilleur moyen de cerner le véritable sens d’un mot ou d’une expression. Expliquera l’origine des expressions, des chengyu, des dictons, là ou ABC ne donnera qu’un équivalent en Anglais. Donne aussi précisément la nature grammaticale de chaque mots, ainsi que ses conditions d’utilisation. Ce dictionnaire se charge aussi d’expliquer les différences d’emploi entre certains mots très proches. Il donne aussi les formes développées des expressions condensées, ce que ne fait pas ABC. Enfin, exemples très nombreux, beaucoup plus que dans ABC. Défaut du GF, ce serait de ne pas contenir assez d’expressions spécialisées. Sa base est beaucoup plus petite que celle d’ABC. Les termes vulgaires, ou dont les chinois ne parlent pas facilement entre eux à l’oral ne sont pas non plus présent. 滚出去 (casse toi), 艳遇 (proche du one night-stand) par exemple ne sont pas présent dans GF, mais le sont chez ABC.
Exemple de définition du dictionnaire GF
Maintenant que vous connaissez mes deux dictionnaires préférés, voici où les trouver et comment les utiliser :
Wenlin 文林 : Logiciel sur ordinateur édité pour le dictionnaire ABC. Interface peu attirante, mais simple d’utilisation. Les entrées se font soit par caractères en mode copier-coller, en pinyin avec ou sans accents, ou en dessinant le caractère. Les entrées peuvent se faire en simplifié comme en traditionnel, et la sortie est présentée sous les deux formes.
Un très bon point de Wenlin est de proposer une analyse des caractères, dans leur forme simplifiée comme traditionnelle. La forme est analysée quand il s’agit des pictogrammes ou des idéogrammes, un sens est proposé de façon plus ou moins évidente quand il s’agit d’un agrégat logique, et les deux parties du caractère sont bien mises en évidence quand il s’agit d’un caractère phonétique. Les fragments sont ainsi clairement identifiés, et Wenlin propose de faire des recherches par fragments, on peut par exemple chercher à savoir quels sont les caractères comportant le fragment 肖, et Wenlin vous sort la liste, comportant les simplifiés comme les traditionnels : 消,销,悄,稍,削,宵,哨,屑,俏,etc, après je ne les connais plus.
Exemple d'analyse de caractères dans Wenlin
Un autre point génial réside toujours dans l’analyse des caractères. Leur fréquence d’apparition dans certaines catégories d’écrits en chinois est répertoriée, du moins pour les 3000 premiers. D’une part cela nous donne un indice sur la nécessité d’apprendre un nouveau caractère, par exemple si je suis débutant et que je découvre un caractères classé 2893ème, je vais peut-être m’abstenir de l’apprendre (sauf s’il est particulièrement amusant comme 鬻 et ses 22 traits). Inversement, après plusieurs mois de Chine s’il m’arrivait de découvrir un caractère inconnu classé 66ème, je n’allais pas le crier sur les toits, mais je me dépêchais de l’apprendre. Dans la liste des caractères comportant肖, Wenlin nous donne ainsi les fréquences suivantes : 消 (500),销 (1047),悄 (1128),稍 (1358),削 (1719),宵 (1719),哨 (2422),屑 (2481),俏 (hors 3000). Certains tentent d’utiliser cette classification pour apprendre les caractères… Je ne suis pas sur que cela marche bien, mais pourquoi pas ?
Pleco : Logiciel hyper abouti et adulé parmi la communauté sinophile. Pleco est programmé pour être installé sur les téléphones munis d’un système d’exploitation (et très prochainement sur Iphone), et il est d’une ergonomie incroyable, que ce soit dans son utilisation comme dans sa conception, car c’est une "boite" dans laquelle on peut rentrer les dictionnaires que l’on veut (à partir du moment où la maison pleco les a mis sous version électronique). Donc un, on comprime notre tas de dictionnaire dans notre téléphone, et de deux, on peut les emporter partout avec nous ! Idéal pour checker un mot dans le métro ou au détour d’une discussion. Je me verrais mal sortir mon dictionnaire à chaque repas, avec Pleco, c’est possible, et ça passe très bien ! De plus, ça garde les recherches du jour en mémoire, et vous pouvez les noter sur un carnet ou dans Anki le soir venu, et le mot, vous le retiendrez.
Au niveau de la conception du logiciel en lui-même, elle excellente à différents aspects. D’abord aux niveaux des entrées. Pour les entrées incomplètes en pinyin, la colonne index sur la droite permet de trouver efficacement le mot qui nous intéresse. Pour les entrées en caractères, on dessine quelque chose qui ressemble de près ou de loin à l’original sur l’écran, et pleco propose un ensemble de 8 caractères parmi lesquels choisir, sans accorder d’importance au nombre ou à l’ordre des traits. On trouve donc très plus facilement le caractère que l’on veut dans Pleco, même quand on ne se souvient que d’une partie de celui-ci.
Ensuite, Pleco depuis sa deuxième version propose une lecture orale des mots, et non plus simplement la lecture des caractères pris séparément. Très important pour la mémorisation si comme moi celle-ci ne peut se faire sans une partie de mémorisation auditive.
Enfin, Pleco est un logiciel livré avec les dictionnaires que l’on désire. Fort heureusement, le dictionnaire ABC est proposé, et l’on obtient ainsi une version portative de ce fantastique dictionnaire. Et depuis la version 2 de Pleco, on peut aussi installer le GF, ce dictionnaire chinois-chinois que j’aime tant, et recommandé par l’excellent Jonathan Chiche.
En conclusion, j’ajouterai que même s’ils peuvent être facilement crackés, n’hésitez pas à faire l’achat de ces deux logiciels, même s’ils peuvent paraitre un peu cher, car le travail qu’il y a eut derrière et leur immense utilité le valent bien. L’achat de Wenlin récompense directement le travail fait dans l’édition du dictionnaire ABC, et l’achat de Pleco sert à payer d’une part les licenses des dictionnaires, d’autre part le travail fait dans la programmation du logiciel et l’adaptation des dictionnaires.