lundi 31 mai 2010

Les chinois voient-ils le monde comme nous?

Certainement pas. Essaye de lire le texte ci-après.

Si tu n'y comprends rien, essaye de le relire en tirant sur le bord extérieur de tes yeux pour les brider comme un chinois.

Alors la lumière apparaîtra et tu saura.

dimanche 30 mai 2010

Corée - Conclusion

Mon cher Dimitri,

Voici déjà une semaine que je suis de retour à Pékin. Mon séjour en Corée a-t-il remis en question ma vision de mon expérience en Chine, comme ce fut le cas après Taiwan et le Japon ? A vrai dire, non. Non, car cela n’a pas remis à jour de nouveaux doutes, n’a pas rompu de nouveaux idéaux que je me faisais de la Chine. Cela a surtout renforcé l’idée avec laquelle je vois la Chine, et plus particulièrement Pékin, à savoir une grande capitale, moderne et développée, dans laquelle vit une population très hétéroclite, qui ne ressemble pas à la ville dans laquelle ils vivent. 

J’ai aussi pleinement pris conscience de l’ouverture internationale que propose la capitale Chinoise. A Pékin, les étrangers sont partout. Poussée par les investissements massifs étrangers et l’organisation des Jeux Olympiques, la ville s’est adaptée aux besoins de cette population étrangère, à leur style de vie très occidental, à leurs langages incompatibles avec les accents et les caractères chinois. L’occident a pris place à Pékin. Je n’ai pas eu cette impression, et tu me l’as confirmé, en ce qui concernait Séoul. 

Afin de répondre aux quelques questions que nous nous posions, toute la semaine durant j’ai posé des questions aux chinois concernant la Corée, et aux coréennes concernant la Chine. Alors pourquoi venir étudier en Chine quand on considère si bassement ce voisin bruyant et malodorant ? La réponse a été unanime : pour le business. La Chine est le premier partenaire commercial de la Corée, et l’aptitude à s’exprimer en mandarin est un atout considérable pour les jeunes diplômés coréens. D’où ce gigantesque engouement à venir étudier en Chine. Il est d'ailleurs assez visible que les étudiants coréens qui viennent  apprendre le mandarin à Pékin sont d’ailleurs seulement motivés par la perspective du HSK (test de niveau en mandarin), et non pas par le partage culturel avec les chinois. Les contacts sont assez restreints. 

Dans l’autre sens j’ai beaucoup interrogé les Chinois sur l’opinion qu’ils ont des Coréens. J’ai été très surpris par une absence d’opinion. Les chinois qui ont toujours quelque chose à dire sur tout le monde n’ont poutant rien à dire sur leur voisin coréen. Pas d’opinion négative, pas d’opinion positive. C’est neutre. Si, une exception. Xu Xiangming m’a expliqué qu’il voyait en la Coréenne l’épouse parfaite. Très attentive à son mari, la coréenne est l’antithèse de la Chinoise. Et en bonus, avec une femme coréenne, tu n’es pas limité à un seul enfant !

Sinon pour revenir à mon séjour à Séoul, je te dois un gigantesque merci. Séoul n’est pas une ville où le tourisme est très développé. Sans contact sur place, on doit pouvoir en faire le tour en deux-trois jours. Mais c’est avec un insider que l’on découvre tous les attraits de cette ville. Cela change tout, et avec une semaine sur place, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde. Et quel plaisir de discuter avec quelqu’un qui comprend la culture asiatique dans laquelle nous vivons ! Car à propos de différences culturelles, il existe aussi une échelle. Au palier 0, nous ne connaissons pas la culture du pays concerné. Au palier 1, nous la connaissons. Au palier 2, nous l’acceptons. Au palier 3, nous l’adoptons ! Où te situes-tu ?

En tout les cas, je suis impatient de vous accueillir toi et Miji prochainement sur Pékin, la muraille de chine, le canard laqué, le Propaganda, ce sont des choses qui ne s’inventent pas, même en Corée ! Et ce sera peut-être l’occasion d’aller faire un tour du coté de Baekdu san ?

samedi 29 mai 2010

Myeongdong: le quartier commerçant de Séoul

Quelques photos de Myeongdong, un de mes quartiers préférés de Séoul. Sans y prendre garde, on se croirait presque de retour dans le quartier des grands boulevards. A quelques détails prêts...

Les rues sont envahies de petits stands de nourriture éparpillés un peu partout.


Ainsi que de petits stands de fausses lunettes, faux caleçons, babioles en tout genre 


Ici on peut s'habiller Samsung



Même en promo, les prix se finissent tous en 000.


Ne serait-ce pas Franck Provost qui se cache au dessus de Watsons?


Leonidas? Mais que vient-il faire ici?


Converse. THE marque de chaussure asiatique. Des chinois(es) aux Coréen(ne)s, c'est la chaussure que tout le monde porte.


A Myeongdong on peut encore acheter des chaussettes roses, des costumes bariolés. Bref, la mode est beaucoup plus débridée ici, et on a fait quelques petits essais, notamment dans le magasin ci-dessus


Ce genre de veste est de retour à la mode en Corée. Tout comme les grosses lunettes aux épaisses montures. Préparez-vous au débarquement de la mode asiatique, bientôt à Pairs!


Et puis à Myeongdong, il y a même des jeunes filles qui proposent des free hugs! 


Bref, je commence à comprendre pourquoi on présente Séoul comme l'un des paradis du shopping sur terre. Il parait que j'aurais même jouer le jeu et que je sois revenu avec un sac beaucoup plus garni qu'à l'aller!

vendredi 28 mai 2010

La Corée, le pays du matin calme? (2/2)

Mon cher Pierre-Alain,

Je suis aujourd’hui de retour à Pékin, en provenance de Corée du Sud. J’y rendais visite à mon ami Dimitri, un camarade de promo parti en stage à Séoul à l’octobre dernier. J’y suis resté une semaine, avec l’intention de m’y reposer, loin de l’agitation Pékinoise et de mon agenda surchargé d’étudiant multi-casquettes. 

Contrairement à mes attentes, cette semaine fut bien éprouvante, et je ressens aujourd’hui un soulagement immense d’être de retour à Pékin. La vie Séoulite m’a mis à rude épreuve toute la semaine durant. Si l’appartement de Dimitri était un lieu de quiétude, la porte à peine franchie, je commençais à craindre pour mon cœur, assailli de toutes parts. 

Tu dois te demander, un peu inquiet et perplexe, ce qui a rendu mon séjour à Séoul si difficile. Les Coréens sont pourtant considérés comme un peuple chaleureux et accueillant, accordant une grande importance à l’image qu’ils donnent aux étrangers, et au gout prononcé pour les activités nocturnes, festives et à haut degré d’alcool. Tout ceci est bien vrai, je te le confirme. Un détail a cependant été omis. Un détail dont tu saisiras l’importance, j’en suis sur, au souvenir de nos longues discussions sur les athlètes féminines, en particulier les coureuses du 200m et les sauteuses en hauteur.

Là tu auras peut-être commencé à deviner le fond de mes pensées. Oui, ce sont bien les jambes des demoiselles coréennes dont je veux te faire part. Te souviens-tu des proportions que tu as recherché en vain toutes ces années ? Te souviens-tu de cet idéal alliant la fermeté du muscle longiligne à la légèreté et l’élancement féminin que tu recherchais en arpentant la montagne Sainte-Geneviève et les clubs d’athlétisme ? Mon cher ami, ne doute plus, cet idéal existe. 

Ces jambes idéales existent. Elles parcourent les rues Séoulites, nues, parfaites, insouciantes. Les talons hauts sur lesquels elles reposent sont tels des trônes modernes nous montrant la réalité du pouvoir d’aujourd’hui. Mes premières heures ici ont été un ravissement à la hauteur de ce dont tu peux imaginer. Des universitaires aux mères de famille, des serveuses aux femmes d’affaire, pas une femme coréenne n’ose couvrir la forme de ses jambes parfaites. Mais imagines-tu ce que c’est que d’être soumis à ce spectacle continuellement ? 

De retour à Pékin, j’ai remplacé l'agitation visuelle par de nouvelles explosions sonores. Mais mon âme est au repos. Peut-être pas pour longtemps. J’apprends aujourd’hui que la municipalité de Shanghai a passé une loi pour interdire aux femmes Shanghaiennes de sortir dans la rue en pyjama. Et si Pékin avait la mauvaise idée de les imiter ?

jeudi 27 mai 2010

Séoul: Fête des lanternes, Faites des Bouddhas


 Si en Chine l’athéisme est religion d’état, en Corée, la ferveur du bouddhisme est encore présente. La semaine dernière, c’était l’anniversaire de Buddha. 2554 ans le bougre. En son honneur, de nombreuses activités étaient organisées, dans les temples, comme dans les rues de la ville. Quelques photos :



Ici dans le Bongeung-sa, au Sud de la ville. Admirez les lanternes suspendues tout autour du bouddha.


 Ici dans le Jogye-sa, autour d’Insadong. Des milliers de lanternes suspendues au dessus de nos têtes.


 De jeunes enfants habillées de la Hanbok, l’habit traditionnel coréen. 


 Un gigantesque défilé dans les rues de Séoul pour célébrer la fête des lanternes. Un incroyable défilé par son nombre de défilants (le défilé a duré plus de deux heures !), leurs sourires et les lanternes qu’ils portaient, quand ils ne les poussaient pas….









La lanterne artistique, un art que je ne connaissais pas à Pékin! Ici le général coréen qui repoussa l'invasion japonais en 1590 et quelques.



mercredi 26 mai 2010

Le Coréen

Cher Aurélien,

J’ai suivi tes derniers articles avec grand intérêt, et ai découvert avec curiosité que l’aspiration était au chinois ce que le voisement était au français. J’attends avec impatience l’arrivée des fricatives. 

Pour rester dans la même thématique linguistique, je te propose un court article sur la langue coréenne que j’ai partiellement découverte au cours de mon dernier voyage à Séoul. 

Tout d’abord, la langue coréenne sonne bien. Vraiment. Les sons sont agréables à l’oreille (les vélaires expirées y sont beaucoup plus douces), et la phrase est rythmée et mélodique, chargée de sens rien qu’à sa musique. Il n’y a pas de tons en coréens, la prosodie de la phrase n’est plus fixée et varie de nouveau en fonction de l’humeur du locuteur. 

Si l’on regarde la structure phonétique du coréen, on découvre que celle-ci est très proche du chinois. Prend aussi en compte que 70% du vocabulaire coréen contemporain est d’origine chinoise, tu comprendras aisément l’origine du terrible accent avec lequel s’expriment les coréens en mandarin, du même acabit que the formidable french accent in English. 

Avant de passer à l’analyse de la structure phonétique du coréen, il me semble important d’éclaircir le système d’écriture, ce qui nous sera utile par la suite. Peut-être connais-tu déjà l’origine du système d’écriture coréen ? Laisse-moi te le rappeler. Avant l’avènement de la dynastie Tang en Chine, les coréens n’avaient pas de système d’écriture unifié de leur langue. L’influence des Tang fut considérable en Asie et les Coréens comme les Japonais importèrent les caractères chinois. S’ensuivit une langue écrite à l’origine totalement distincte de la langue orale. Au fur et à mesure des siècles, un mix se produisit, l’écrit influença d’abord l’oral par un apport lexical massif, puis l’oral influença l’écrit quand le roi Séjong adopta au XVème siècle une transcription phonétique des termes coréens. L’écrit coréen devint alors composé de caractères chinois tels qu’on les connait, et de caractères coréens à peu près phonétiques. La coexistence perdura jusqu’à très peu, et ce n’est que durant les dernières décennies que les coréens abandonnèrent finalement les caractères chinois.

Il faut savoir qu’en remplaçant les caractères chinois par les caractères coréens, les coréens conservèrent la structure morphémique du chinois. S’il existe une lettre correspondant à chaque consonne (ㅂpour b, ㄷpour t, ㄱpour n, ㅁpour m, etc.) et à chaque voyelle (ㅗ pour o, ㅏpour a, ㅡ pour eu, ㅜ pour ou, etc.), l’écriture ne se fait pas en juxtaposant les lettres à l’horizontal, les unes derrière les autres, mais en les groupant par unité syllabique porteuse de sens. Un exemple simple, le thé qui se dit tcha en chinois et se prononce pareil en coréen, s’écrit 차. C’est là que se situe tout le génie de l’écriture coréenne. Ecriture par ailleurs extrêmement simple dont l’ensemble des lettres se mémorise en moins de deux heures, à condition de comprendre la phonétique qui va derrière. 10 voyelles et 14 consonnes qui permettent de construire un nombre impressionnant de caractères coréens. 

Revenons à la structure phonétique du coréen, commençons par les consonnes, et allons directement aux occlusives, car c’est le sujet chaud du moment. Si nous procédons par paires d’occlusives voisées et sourdes en français, par paire d’occlusives expirées et non expirées en chinois, le coréen fonctionne lui par triplet. Il suffit de mêler le voisement à l’expiration pour produire un triplet, voire un quadruplet, d’occlusives me diras-tu. Oui, mais non, car le coréen, pas plus que le chinois, ne se concentre sur le voisement des consonnes. Les occlusives coréennes se distinguent en version faible (version non voisée non expirée: ㅂ,ㄱ,ㄷ), en version expirée (non voisée expirée: ㅍ,ㅋ,ㅌ) et en version forte (tout aussi peu voisée et expirée que la version faible, mais avec une accentuation: ㅃ,ㄲ,ㄸ ). Une nouvelle distinction apparait au sein de la famille des occlusives non voisées non expirées. J’ai demandé aux français comment comprendre la différence entre les occlusives faibles et fortes, ils ne savaient pas. J’ai demandé aux coréennes, elles m’ont dit que c’était comparable à l’accentuation des syllabes en anglais. Je sens malgré tout que quelque chose d’autre se cache derrière, je continue à investiguer. 

Continuons sur les fricatives. Les deux couples (zh,ch) et (j,q) du chinois se retrouvent confondus dans un même couple en coréen : (ㅈ,ㅊ). Tu comprendras aisément la logique de la chose si tu repenses à l’analyse que tu avais faite sur les associations possibles entre consonnes et voyelles en pinyin. Les s et x du pinyin chinois sont aussi agrégés en une même consonne ㅅ pour la même raison. Les prononciations deㅈ, ㅊ etㅅ dépendent donc de la voyelle qui les suit. On en serait presque étonné à trop se rapporter au pinyin du chinois qui est une transcription phonétique exacte. Pourtant c’est aussi le cas en français comme en anglais. Girafe et gâteau, this and thank, suffiront à t’en convaincre. 

Continuons la comparaison avec le français. Au grand dam de John, le coréen est aussi une langue à liaisons. Un noiseau, deux zoiseaux, trois zoiseaux, qua troiseaux, ça marche pareil en coréen. Les consonnes finales des syllabes se prononcent différemment en fonction de ce qui suit. Si les caractères sont fixés, la prononciation ne l’est pas. La simple mémorisation de l’alphabet coréen se révèle donc insuffisante pour lire correctement une phrase coréenne, il faut aussi apprendre les règles de liaison. Mais pour un français, cela n’a rien d’effrayant. 

Bref, l’écriture est aisée, la prononciation pas trop tordue, le coréen est un outil de communication plus abouti que le chinois. Un problème de taille demeure, et il s’appelle grammaire. As-tu déjà demandé à une coréenne comment dire bonjour ? Elle aura répondu que ça dépend du degré de politesse que tu veux mettre dedans. La formule la plus simple Annyang correspond à un « salut » français, très familier et que tu ne peux dire qu’aux amis de même âge que toi. Pour un bonjour plus respectueux il faudra dire annyang haseyo. Ça fait déjà 5 syllabes. Et c’est pareil pour tout. Il existe 43 façons d’exprimer une même chose, mais des degrés de politesse différents allongent la phrase de manière assez terrifiante, même pour les idées les plus simples. C’est assez déroutant pour le débutant car s’il ne saisit pas la structure grammaticale de la phrase et les particules de politesse, il est incapable de saisir l’élément porteur de sens. Comme en français il est difficile de saisir la similitude de sens entre (je suis beau/elle est belle) en raison des variations des pronoms/verbes/adjectifs en fonction de la personne, la phrase coréenne change radicalement en fonction des degrés de politesse. Tout ça pour dire que l’apprentissage du coréen passe par un apprentissage rigoureux et intensif de la grammaire. La grammaire coréenne est LA difficulté du coréen. 

En dehors des problèmes des degrés de politesse, il faudrait évoquer deux autres points dans la structure particulière de la phrase coréenne : l’ordre des mots, et la structure agglutinante. Les verbes sont placés à la fin de la phrase, ce qui peut être assez déroutants, on l’attend un peu trop impatiemment comme en allemand dès lors qu’on utilise un verbe modal ou un participe passé. Et les mots sont modifiés par l’ajout de préfixe/suffixe en tout genre qui vont signifier les fonctions, négations, temps, degré de politesse, et j’en oublie certainement. Bref, la grammaire c’est l’enfer du coréen, du moins dans les premières étapes de l’apprentissage. Tout le monde compare la grammaire coréenne à la grammaire japonaise, un mur de difficulté durant la première phase d’apprentissage, mais une difficulté qui s’amenuise au fur et à mesure que l’on progresse. Tout l’inverse du chinois donc qui présente une structure de phrase élémentaire dans sa forme basique, mais qui devient horriblement compliqué lorsque l’on s’enfonce dans les relations de logique compliquée et la langue écrite, qui emprunte aux chinois classiques de nombreuses formes grammaticales absconses.

Tu l’auras sans doute déjà senti, la langue coréenne m’attire énormément. J’ai très envie de m’y mettre sérieusement. Cela risque d’être difficile durant les mois prochains, il faut que j’essaie de finir ma recherche d’abord, mais ensuite pourquoi pas, tu m'accompagnes?

mardi 25 mai 2010

Séoul, les sites du pouvoir

Séoul, capitale du royaume de Corée, fut fondée autour des années 1400, soit une capitale encore plus jeune que Pékin. Son emplacement fut choisi pour des raisons autant stratégiques que géomanciques, avec un grand fleuve au Sud, et des montagnes aux trois autres points cardinaux. 

Le palais officiel, Gyongbok-gung, y fut construit dans la tradition chinoise :

Le Gyongbok-gung

 Le pavillon principal


 Chambre du roi


 Dans les jardins



Construit en 1405, le Changdoek-gung devait d’abord être une annexe du palais royal. Après les destructions de l’invasion japonaise des guerres Imjin (1592-1598), le Changdoek-gung fut reconstruit en premier, et devint le siège du gouvernement jusqu’en 1868.

  le Changdoek-gung







Pavillon de la reine

Le jardin du Changdoek-gung, aussi appelé jardin secret, est le plus bel endroit que j’ai visité à Séoul. Si les bâtiments officiels sont imposants au sein des palais royaux, perdus au milieu de la forêt, ils revêtent un charme incroyable :

 




lundi 24 mai 2010

La Corée, le pays du matin calme? (1/2)

Mon cher Fabien,

Comme tu le sais déjà très bien, j’étais en Corée la semaine dernière. J’écrivais à mon père à mon retour à Pékin à quel point j’avais été surpris des similitudes culturelles entre chinois et coréens. De la calligraphie à l’étiquette alcoolique, du système éducatif à la façon de battre les jeux de cartes, de la haine des japonais au nationalisme débordant, les coréens sont des chinois dont on entend peu parler. Un point malgré tout qui les différencie radicalement des chinois, c’est la passion avec laquelle ils font la fête. Ils aiment sortir, ils aiment s’amuser, ils aiment danser. En débarquant de Tsinghua dont les étudiants ne quittent jamais le campus, la différence est de taille.

Je tiens à te décrire ma première soirée. Les valises à peine déposées, Dimitri m’emmène dans le quartier de Hongdae pour une longue soirée. Nous commençons par un diner de grillades coréennes. Classique me diras-tu. Oui, mais l’ambiance me parait différente, enjouée et détendue. Il y a beaucoup de monde dehors, tous les restaurants sont ouverts sur la rue et quelques terrasses sont même aménagées. Les jeunes et moins jeunes se réunissent autour de bières et barbecue sans que les sonos ou autres chinois bruyants incivilisés ne viennent nous casser les oreilles. 

On enchaine avec un petit bar où l’on parvient à boire suffisamment de bières pour que la note de boissons dépasse celle du plat de fruit que l’on se voit imposer, et on débarque au Cocoon, l’une des boites les plus populaires du quartier. En découvrant la salle principale, je m’arrête, ébahi. Cela ressemble à tout sauf à une boite chinoise. D’abord c’est grand, très grand, et archi plein. La salle est aménagée en arène, avec des podiums en escalier faisant face à la piste de danse centrale. Ce qui est extrêmement amusant, c’est que tous les danseurs de la "place centrale" sont alignés, regardant dans la même direction. Ils n’osent pas se regarder ? On se sent plus libre de danser quand on ne se sent pas observé ? C’est plus adapté à la technique d’approche coréenne ?




Dans tous les cas on se mêle à la foule et on essaie de danser comme eux. On se rend compte qu’ils dansent tous pareils. En temps normal, c’est un mouvement de projection des pectoraux vers le haut amorcé par un brusque mouvement de redressement des jambes, et ce, associé à un mouvement de balancier de droite à gauche. Régulièrement une musique populaire leur inspire une choré particulière qu’ils connaissent tous parfaitement, et c’est toujours une salle qui bouge à l’unisson. Je retiendrais particulièrement les chorés sur One-Two-Three-Zero, et I’m-not-a whore. 

Alors que je monte sur les podiums pour avoir un peu d’air, je réalise une différence de taille par rapport à Pékin : il n’y a quasiment pas d’étrangers ! Nous sommes moins d’une dizaine parmi des centaines et des centaines de coréens et coréennes. Cela parait normal, mais à Pékin, ce sont les étrangers les instigateurs des activités nocturnes. Ici ce sont bien les locaux, et ça n’en ait que mieux. 

Pour terminer cette lettre je voudrais partager avec toi quelques grands tubes coréens, qui finiront d’éveiller en toi un intérêt que je sens naissant pour la culture pop coréenne.
  1. Nobody des Wonder Girls. Le tube coréen le plus populaire en Chine. Musique d’ambiance dans les boulangeries coréennes, dans les escalators, dans les magasins de vêtements, etc. Il faut absolument regarder le clip. Admire le synchronisme !
  2. Sorry Sorry des Super Junior. Un groupe que m’a fait découvrir Julien, un inconditionnel de la culture coréenne. Tu pourras y trouver un aperçu de comment s’habiller, comment se coiffer et comment danser comme un coréen. Jette aussi un coup d’œil à Super Girl .
  3. Ave Maria de Kim Ah-Joong. Entendu plusieurs fois au karaoké pékinois, les chinoises raffolent de cette chanson, même si elles ne maitrisent pas beaucoup plus que le Ave Mariaaaaaaa ! 
  4. Insomnia de Wheesung, reprise du titre du même nom de Craig David, tout aussi détonnant. Jamais entendu en Chine, elle passe pourtant en boucle dans les bars, discothèques et même dans les rues Séoulites. Un immanquable.
En conclusion, sache que la Corée fut à la hauteur de sa réputation. Un pays peu connu, peu touristique, mais qui se visite le soir! Une étape immanquable pour la liste de tes futures destinations!

samedi 22 mai 2010

La Corée, ou une petite Chine moderne.

Cher papa,

Une semaine en Corée, un blog laissé à l'abandon, un bateau sud-coréen coulé par les nord-coréens... Voici un peu de nouvelles et beaucoup de lecture. Il est 16h21 ici dans l’aéroport international d’Incheon, l’envol de mon avion est prévu dans moins de deux heures. Si je rentrais directement à Paris, j’imagine que tu serais impatient de me demander : Alors la Corée ? Une question banale mais qui plonge souvent le voyageur dans l’embarras. Dimitri me rapportait les propos d’un grand anthropologue : « Sur la Corée, après un jour, on peut écrire un livre. Après une semaine, on peut écrire une page. Après un an, on ne dit plus rien du tout. » Et c’est vrai que samedi dernier en allant me coucher après ma première soirée en Corée, j’aurais pu t’en parler pendant des heures. Mais plus le temps passe, plus on en voit, et plus l’extraordinaire se change en ordinaire. Après plus d’un an d’expérience de la Chine, je me souviens avoir discuté avec Antoine de la réponse standard à donner aux Français nous demandant : « Alors, la Chine ? ». Nous avions adopté : « C’est cool, la vie est pas chère, les filles sont jolies et la bouffe est bonne ». C’est ce que les gens veulent entendre, ça évite de s’embarquer dans de trop longues discussions.

Je me souviens de ma première semaine à Pékin, en cours de chinois à la BLCU. La professeur de chinois nous demandait de présenter les principales caractéristiques de notre pays. Un « Alors, la France ? » un peu caché. Je me souviens avoir été extrêmement désemparé. La France ? La France ? Que dire de la France quand on y a toujours vécu ? Sans la confrontation avec les valeurs étrangères ou l’expérience à l’international, la France fait office de normalité, de règle, de standard. Alors quoi dire ? Je me souviens être resté muet, et avoir laissé la prof répondre : "La France, c’est Paris et le romantisme, la France, c’est la mode et les parfums, la France, c’est la Provence et la plus belle langue du monde". 

La semaine dernière encore à la radio j’écoutais une émission abordant le thème des différences culturelles, et ils discutaient précisément du cas des Français. Le tableau était plus proche de la réalité : « Un, les français aiment râler. Deux, ils aiment critiquer. Trois, ils aiment dire ce qu’ils pensent. » Trois points qui se rapportent à deux valeurs très françaises : la sincérité et le cartésianisme. Le présentateur voyait les cultures françaises et chinoises comme opposées sur une échelle des valeurs. Quand le Français prône la vérité, le chinois, ou l’asiatique de manière plus générale, considère l’apparence. De là, il ne recherche pas la sincérité, mais plutôt à préserver l’image qu’il donne. C’est ce qu’on appelle sauver la face. Quand le Français fidèle à Descartes doute de tout, à commencer de ses supérieurs, ses gouvernants, ses amis, et recherche le progrès par la rationalisation, le Chinois fait confiance, suit, essaie, échoue, essaie quelque chose de nouveau, réussit, etc. Les chinois sont empiristes. C’est la méthode de grand-mère appliquée à toute la science. Pas étonnants que les Français soient si bons en maths et que les ponts chinois tombent si souvent. Pas étonnant non plus que la majorité des inventions historiques proches de la réalité quotidienne soient originaires de Chine. 

Mais sinon, la Corée ? En un mot, c’est cool. En trois mots, c’est une petite chine moderne. Laisse moi t’expliquer pourquoi. 

Tout d’abord les héritages religieux, sociaux et historiques des deux pays sont très proches. Historiquement, la Corée a toujours été très proche de l’empire chinois. Proche, mais pas au point de faire directement partie de l’empire au même titre que les nouvelles provinces régulièrement annexées au fur et à mesure de l’expansion de l’empire vers le Sud ou vers l’Ouest, mais proche car vassale de l’empire. Le roi coréen devait rendre compte à l’empereur chinois, et lui verser un lourd tribut. L’empereur chinois en retour lui promettait sa protection, et lui interdisait d’utiliser le symbole du dragon qui lui était réservé. Les échanges entre les deux pays ont été moteur d’une mise en commun des cultures, des traditions, de l’écriture, à l’image du confucianisme, du bouddhisme, et des caractères chinois. 

La doctrine de Confucius qui a été la théorie politique et sociale dominante dans l’empire du milieu jusqu’au XXème siècle l’était tout autant en Corée. La société coréenne est encore profondément confucianiste aujourd’hui, les aspects les plus visibles étant le respect de l’étiquette resté intact, et le respect des gouvernants. La Corée a beau être une démocratie dans les textes, cette démocratie ne ressemble pas beaucoup à la notre. A une vie démocratique faible est associé un nationalisme poignant. Tout comme le chinois, le coréen veut montrer bonne figure au monde entier, et ne supporte pas entendre un étranger parler de son pays avec une vision différente de l’image qu’il a voulu donner. Malgré la démocratie, la Corée n’est pas plus le pays des libertés que la Chine. 

A l’image du Confucianisme, le bouddhisme qui s’était introduit en Chine avant l’avènement du premier empereur Qin Shihuang, s’est répandu jusqu’à l’extrême Est du continent asiatique durant les siècles suivants. Le bouddhisme est rapidement devenu religion nationale, et l’est resté jusqu’au XXème siècle. Une seconde religion a aussi été introduite en Corée en provenance de Pékin : le christianisme. Les Jésuites eurent en effet une influence très grande sur l’empereur chinois dès le XVIème siècle. Aujourd’hui on peut grossièrement considérer que la moitié de la Corée est chrétienne, la seconde moitié bouddhiste. La différence avec la Chine est flagrante. D’une part les reliques religieuses n’ont pas subi la révolution culturelle, d’autre part les coréens sont encore croyants et pratiquants. 

Après le confucianisme, après le bouddhisme, le troisième grand apport de la Chine vers la Corée fut les caractères. Les coréens qui n’avaient pas adopté de système d’écriture cohérent adoptèrent durant la dynastie Tang (618-907) les caractères chinois. Durant les siècles qui suivirent, le chinois devint la langue des élites, et la seule manière de passer à l’écrit. A partir de là, la langue coréenne fut autant influencée par le chinois que l’anglais fut influencé par le français : l’apport lexical est énorme. Aujourd’hui 70% des mots coréens sont d’origine chinoise. Si les coréens adoptèrent un deuxième système d’écriture au XVème siècle pour mettre par écrit les termes d’origine coréenne, les deux systèmes d’écriture coexistèrent jusqu’au XXème siècle. Si étant jeune tu avais essayé de lire un journal en Coréen, tu aurais remarqué le grand nombre de caractère chinois au milieu des phrases. Les enfants coréens de l’époque devaient apprendre environ 2000 caractères chinois à l’école. Si aujourd’hui les coréens n’utilisent plus les caractères chinois que pour écrire leurs noms ou pour faire classe sur une affiche, l’influence est toujours présente.

Confucianisme, Bouddhisme, Système d’écriture. Que du bon ? Les deux pays partagèrent en fait aussi la guerre. Quand les mongols déferlaient sur la Chine, ils ne s’arrêtaient pas aux portes de la Corée. Quand les Japonais décidaient d’envahir la Chine, ils commençaient par la Corée. Ce n’est pas pour rien si le sentiment de haine antijaponais est encore plus fort chez les Coréens que chez les Chinois. Et s’il existe un sentiment de mépris des Coréens envers les Chinois, c’est parce qu’ils ne supportent pas de voir ce qu’est devenu ce "grand frère". « Les chinois ne se lavent pas, ils puent, ils ne sont pas civilisés » m’ont rapporté tous les coréens. En les comparant aux chinois, je faisais affront à leur modernité, pas à leur culture. La Corée du Sud est aujourd’hui un pays très moderne et civilisé. Tu t’y plairais, j’en suis sur. La modernité alliée au style de vie à la Chinoise. Une troisième variante après Singapour et Taiwan. Et tout autant qu’à Singapour et Taiwan, partout tu trouves des food stalls, ces restaurants cheap en plein air où l’on peut profiter d’un large assortiment de snacks (小吃), comme on peut en trouver en chine : soupes, raviolis, etc.

Peut-être as-tu des collègues qui ont déjà travaillé en Corée, ou avec des Coréens ? Malgré tout ce que je viens de te dire, si tu leur demandais si pour eux la Corée est plus proche de la Chine ou du Japon, ils risqueraient bien de te répondre du Japon. C’est en fait le cas dans le monde du travail Coréen.

Après la guerre de Corée et la fin de la dictature, autour des années 70, le pays est prêt à démarrer son développement économique. Les Coréens regardent autour d’eux. A l’ouest, la Chine communiste en pleine révolution culturelle, à l’Est le Japon et ses conglomérats florissants. Qui crois-tu qu’ils aient choisi ? Les Coréens se sont ainsi construit une nouvelle économie de marché axé sur les conglomérats : Samsung, Daewoo, LG, etc. Samsung est aujourd’hui la première entreprise nationale, produisant entre 10 et 20% du PIB coréen en fonction des systèmes de calculs. Dimitri aime raconter qu’en Corée on peut vivre Samsung : De la maternité aux pompes funèbres, Samsung s’occupe de tout. Avec le système des conglomérats, les Coréens ont aussi importé la notion de statut, notion si difficilement acceptée par les occidentaux. Tu rentres dans l’entreprise avec le statut le plus bas, quelque soit ta formation, et tu montes régulièrement dans la hiérarchie au cours de ta carrière que tu feras dans la même entreprise. L’entreprise et la hiérarchie décident de tout pour toi. Le CEO, c’est Dieu. Tous les mouvements sont du haut vers le bas, le subalterne obéit, mais ne soumet pas d’idée ou de propositions. Comme au Japon tu ne quittes pas le bureau tant que ton chef y est encore. Tu ne travailles pas plus, tu essaies juste de mieux étaler ton travail. Contrairement aux idées reçues, les coréens ne sont pas efficaces au travail. Peut-être parce que les heures supplémentaires ne sont pas déclarées…

La culture coréenne poussée par le développement économique s’est donc fortement japanisé aux cours des dernières décennies. Mais rassure-toi, même au niveau économique, les coréens restent des chinois. Si les entreprises japonaises créent et innovent, les entreprises Coréennes suivent le mauvais esprit chinois. Attirer les entreprises étrangères sur le marché national pour mieux se jouer d’elles. Les entreprises étrangères ne peuvent pas entrer sur le territoire coréen sans créer de joint venture et proposer de transferts technologiques. Les entreprises coréennes réutilisent aussitôt ces technologies sous leurs propres noms, et c’est l’enfer pour les entreprises étrangères. Dimitri qui bosse Séoul pour Thalès-Samsung me l’a répété régulièrement. Au sein du même groupe qu’est Thalès-Samsung défense, si ses boss français bossent pour Thalès qui possède plus de 50% des parts du groupe, tous les coréens travaillent pour Samsung ! Dans la même veine, les copies de produit étrangers sont presque aussi nombreuses et tout autant tolérées à Séoul qu’à Pékin. 

Alors pour résumer en neuf mots, la Corée, une petite chine qui se serait déguisée en Japon ? 

Je te laisse quelques photos en guise de conclusion.
 
 Une touche de tradition sur fond de modernité


Quand ni les talibans, ni les communistes ne sont passés par là, le Buddha tient encore debout



 Temps moyen de prière dans un temple bouddhiste chinois: 12 secondes, le temps de faire les 4 flexions.
Temps moyen de prière dans un temple bouddhiste coréen: plus que ma patience


Les food-stalls

Et le cuistot qui va avec!


Samsung s'occupe de tout


Louis Vuitton et Dolce Gabbana. Ils auraient pu essayer d'être plus originaux sur les noms...



Comme Tokyo, comme Shanghai, Séoul ne faillit pas à la règle: toujours un petit tour chez Paul pour finir le séjour!

vendredi 14 mai 2010

Corée - Introduction

Mon impression la plus ancienne de la Corée doit remonter aux cours d’histoire du lycée, et la furieuse remontée vers le Nord du général McArthur, ramené par les chinois dans ses 38 scellant ainsi la limite entre l’Asie communiste et l’Asie capitaliste. Au Nord, la moitié Nord du pays qui débouche sur les territoires du Nord-Est de la Chine, Pékin n’est pas bien loin. Au Sud, la moitié Sud du pays, bien plus proche de Tokyo que de Pékin.

Depuis la France, La Corée, c’est un tout petit bout de terre que l’on distingue à peine, caché par ses deux grands voisins chinois et japonais. La Corée a d'ailleurs historiquement longtemps été un pendule, oscillant entre l’Ouest chinois, et l’Est japonais

A Tsinghua, la Corée semble à ma porte. Plus de la moitié des étudiants vivant à mon étage sont d’origine Coréenne, il y a un parfum de kimchi qui règne dans les couloirs, et partout résonnent des Anyang, sorte de cri de rassemblement dans un langage déroutant, saccadé et très musical. 

A Wudaokou, les restaurants sont coréens, les boulangeries françaises sont coréennes, les jupes les plus courtes sont aussi coréennes. 

Vu d’ici, la Corée, c’est un peu la lune chinoise. Certes petite de taille et de population, mais par sa position intermédiaire, elle est capable d’éclipser Tokyo aux Pékinois. Et certes le corps massif qu’est la Chine a imposé sa période de rotation à son petit voisin coréen, mais ce sont bien des marées coréennes qui débarquent aujourd’hui tous les jours à Pékin. 

Demain, je prend la chemin inverse. Séoul, me voilà !

jeudi 13 mai 2010

Jeu des 7 erreurs

Le petit Li s'est trompé en recopiant ses caractères, saurez-vous l'aider à retrouver ses erreurs?

夭备究贫秦浩拨

天奋穷贪奏洁拔

mardi 11 mai 2010

Les retroflexes en Chinois

Continuons aujourd’hui notre série sur la prononciation du chinois, un sujet étonnamment difficile. Dans le premier article nous avons longuement parlé des tons. Le ton, c’est la musique avec laquelle une voyelle est exprimée : sa durée, sa hauteur, ses variations de hauteur. Or en Chinois, à l’exception des voyelles e et i, les voyelles sont toujours précédées d’une consonne dans une syllabe. Avant d’apprendre à articuler les voyelles avec leurs tons, il aurait été logique de commencer par les consonnes. Nous avons donc commencé par la fin. Nous avons néanmoins déjà fait la moitié du chemin entre les voyelles et les consonnes dans le deuxième article, où nous avons discuté de l’importance du soufflement d’air qui retarde l’arrivée de la voyelle dans le cas des consonnes aspirées. Aujourd’hui nous nous intéresserons aux consonnes du Chinois. Pas à toutes, celait serait bien trop, mais à un groupement particulier de consonnes, que l’on appelle les consonnes rétroflexes, à savoir zh, ch, sh, r.

Consonne rétroflexe se dit 舌尖后音 en Chinois : son arrière de la pointe de la langue. Cela désigne une consonne articulée avec la pointe de la langue pointée vers l’arrière de la bouche. Jusqu'à aujourd'hui j’avais  toujours pensé que seul le r, consonne que je n’ai jamais réussi à articuler, était une consonne rétroflexe. De plus le r, c’est erhua, c’est l’accent pékinois, c’est la patate chaude dans la bouche. C’est tout l’inverse de l’accent du sud, léger, raffiné et musical. Je n’ai donc jamais vraiment fait l’effort de le prononcer correctement, et ai rapidement abandonné après quelques tentatives couronnés d’échec. Hier on s’est moqué de ma façon de dire 中国. Zhongguo, un des mots les plus basiques, que je pensais honnêtement articuler correctement. En comparant avec la bonne prononciation, j’ai senti une lourdeur dans ma prononciation, mais pas de différence radicale. En farfouillant un peu sur internet, j’ai trouvé sur Sinoplice l’origine de ma prononciation incorrecte : la position de ma langue. Je positionnais le plat de ma langue sur la bosse entre la gencive et le palais, alors que le zh de zhongguo doit être articulé avec la langue incurvé vers l’arrière, et la pointe de la langue appuyant sur le palais. 



La pointe de la langue appuyant sur le palais ? Une configuration bien originale pour articuler une consonne, inexistante dans les langues françaises comme anglaises, et donc toute nouvelle pour moi. Ce fut aujourd’hui une découverte comparable à la découverte de la position de la langue entre les dents lors de l’articulation des th en anglais. Malheureusement pour moi, cette découverte arrive bien tard, et ma prononciation incorrecte est maintenant bien ancrée. Il faut que je « retraite » l’ensemble de mon chinois pour réapprendre à articuler tous les zh avec la langue incurvée vers l’arrière et la pointe appuyant sur le palais. 中,这,重,猪,etc, des mots en zh des plus basiques aux plus compliqués, il va tous falloir réapprendre à les articuler. 

Mais ce n’est pas tout ! J’ai découvert que non seulement zh devait être prononcé comme ceci, mais aussi ch, sh, et r. Pas étonnant pour ch, car c’est la version aspirée de zh. J’arrive relativement bien à le prononcer avec la langue dans la bonne configuration : 茶,吃,etc. C’est plus difficile avec sh et r. J’arrive péniblement à les articuler dans cette nouvelle configuration. J’arrive bien a toucher mon palais avec la pointe de la langue, mais je ne parviens pas à conserver la position recourbée de la langue. Les chinois m’ont pourtant confirmé qu’elle devient bien l’être, même dans sh : 是,说,etc. Bref, je me suis lancé aujourd’hui dans un long réapprentissage du parler chinois… 

En conclusion, relativisons l’importance à accorder aux consonnes rétroflexes. En les prononçant mal, avec une position de la langue incorrecte, par exemple en la laissant inerte au milieu de la bouche, le son que l’on articule ne sonne pas chinois, mais est compris. Il n’est pas confondu avec un deuxième son porteur d’un sens différent, comme c’est le cas pour les tons, ou les consonnes aspirées. L’articulation correcte des consonnes rétroflexes, c’est déjà chercher le luxe. C’est essayer de tenir plus que 2 ou 3 syllabes au téléphone avant que l’interlocuteur ne découvre votre origine étrangère. C’est aussi parler avec plus de légèreté, plus de raffinements. Tout ce que l'on attend d'un Français, non?

lundi 10 mai 2010

Défilé de Mode

Dimanche c’était défilé de mode à Tsinghua. Défilé de mode organisé par le département d’art. Les "models" issues d’une première phase de qualifications le mois dernier venaient de tous les départements, y compris les départements de mécanique automobile, de chimie industrielle et de physique nucléaire. Ah non, en fait, tous sauf le nucléaire. Une longue scène revêtue d’un tapis rouge, des projecteurs dans tous les sens, et des spectateurs de part et d’autre de la scène venus regarder. Regarder quoi ? Mme Li, présidente du jury, lors de son petit bilan à l’issue du défilé : « C’était vraiment très bien, on sent une progression forte par rapport aux années précédentes. Par contre, vous n’avez pas dit clairement ce qu’il fallait juger : la silhouette des models, leur démarche, leur allure, leurs vêtements ? Du coup j’ai pas su quoi regarder»


 Belle salle


Les hommes ont la classe. Ou pas.


 Robes longues, robes courtes. Les secondes sont assurément plus à la mode à Wudaokou.


+1,68m


Inspiration asiatique


 Avec Lucy, qui nous a infiltré dans la salle ce soir là. Elle en a profité pour gagner le 1er prix dans -1,68m