jeudi 20 août 2009

Taïwan et la Chine

Maintenant que l’on connait un peu mieux les origines de Taiwan et de ses habitants, nous pouvons espérer appréhender avec un peu plus de discernement l’épineux problème de ses relations avec Pékin. Commençons par quelques faits :

  • Le nom officiel de la Chine est 中华人民共和国, République Populaire de Chine. Celui de Taiwan est 中华民国, République de Chine.
  • L’une des deux compagnies aériennes internationales basées à Taiwan est dénommée China Airlines, que l’on ne doit pas confondre avec Air China, elle propriété de la république populaire de Chine. Comme cette compagnie aérienne, la majorité des grandes entreprises publiques de Taiwan portent le nom China : China Steel, China Telecom, Chinese Petroleum, China Shipbuilding, etc.
  • Taiwan est dotée du statut administratif de région (省) par la République Populaire de Chine. Pékin propose à l’ile de prendre le statut de région administrative spéciale en suivant l’exemple de Hong-Kong ou Macao.
  • Les vieux scooters portent sur leur plaque l’inscription 台湾省, région de Taiwan, les scooters neufs ne l’ont plus.
  • Jamais aucun traité d’indépendance ne fut déclaré par Taiwan.
  • Actuellement, seulement 23 états reconnaissent la république de Chine.
  • Une délégation taïwanaise était présente aux JO de Pékin. Elle portait le nom de Chinese Taipei. Hong Kong avait aussi sa délégation propre.
  • Taiwan a eu un siège de membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU dès la création de l’institution, jusqu’en 1971, date à laquelle la république populaire de Chine fut admise à l’ONU tandis que Chiank Kai Check retirait la république de Chine.
  • Les Etats-Unis ont déclaré le Taiwan’s Relations Act stipulant qu’ils reconnaissaient la République Populaire de Chine comme légitime sur l’ensemble du territoire Chinois, incluant Taiwan, mais qu’ils défendraient Taiwan en cas de toute agression.


Reprenons maintenant la trame historique un tout petit peu plus en arrière que nous ne l’avions laissé, alors que Chiank Kai Check est toujours président de ROC (Republic of China) et dictateur de Taiwan placée sous loi martiale. Son idée première en investissant Taiwan était de revenir pour renverser les communistes et retrouver sa légitimité sur toute la Chine en prenant appui sur cette base arrière que représentait Taiwan. De cette période là subsistent deux systèmes politiques revendiquant la légitimité sur le territoire incluant la Chine continentale comme l’ile de Taiwan.

Avec la fin des combats et la mort du général Chiank, la dictature se fait moins dure à Taiwan, et la loi martiale est petit à petit abandonnée. La fin de la loi martiale est déclarée en 1987 et l’ancien premier ministre devient le premier président de Republic of China né sur l’ile de Taiwan.

Avec la progression du débat démocratique ressortent deux partis majoritaires : le guomindang conservateur, et dont la politique se conjugue avec la volonté d’améliorer le dialogue avec Pékin, et peut-être arriver un jour à une réunification. On parle du parti bleu. Le deuxième est le parti progressiste. Son but est opposé, donner à Taiwan une indépendance effective vis-à-vis de la Chine. Il s’agit du parti vert.

Le guomindang fut au pouvoir sous l’ère des Chiank puis durant les premières années de la démocratie, jusqu’en l’an 2000. Durant ces années là, Taiwan prospérait économiquement et était un formidable partenaire commercial pour la Chine continentale. La population taïwanaise bénéficiait d’un enrichissement et d’une amélioration des conditions de vie. Les hommes d’affaire taïwanais investissaient de larges sommes en Chine continentale, les fabriques étaient délocalisées sur le continent où la main d’œuvre était moins chère, et l’industrie de l’ile se reconvertissait dans le secteur high-tech de l’informatique, ils sont toujours numéro un dans le domaine, avec deux marques de prestige : Acer et Asus.

Mais. Car bien sur, il y a un mais. Mais il existe un gouffre entre la population de l’ile et celle du continent. Elles ont beau avoir des origines communes, celles-ci remontent à un ou plusieurs siècles. Aujourd’hui, il est bien difficile de trouver un taïwanais dont une partie de la famille se trouve sur le continent. C’est seulement le cas des derniers immigrants arrivés avec le général Chiang, mais ceux-ci sont très minoritaires et ne furent que difficilement intégré à la société.

Ensuite, et c’est certainement là le plus important, il existe un gigantesque mépris des taïwanais envers les continentaux. A Taïwan, on les appelle les daluren (大陆人), les continentaux, quand il faut faire bonne figure, les A-la-a quand ils sont entre eux, c’est en taïwanais, et c’est un terme très condescendant. Arrêtez de leur demander en plaisantant (tout le monde le fait) s’ils sont Chinois, ils détestent ça !

Et puis quand les taïwanais arrivent à Pékin, comme ce fut le cas de Violette pendant 6 mois, ils ont bien du mal à comprendre pourquoi la rue ressemble à un décharge publique, pourquoi on jette les détritus à travers les vitres des bus, pourquoi on crie aussi fort dans la rue ou dans les restaurants, pourquoi on s’insulte aussi facilement dans la rue, pourquoi on fait preuve d’un tel manque de courtoisie, de politesse.

Bref, le taïwanais ne ressemblait déjà pas tant que ça au continental il y a un siècle, et pendant que les uns étaient dirigés par les occupants Japonais vers la modernité, les autres étaient plongés au fond du trou à coup de bond en avant et de révolution culturelle. Si la Chine d’aujourd’hui n’est plus celle de l’ère Mao, elle en garde les conséquences. Indéniablement, au moins par l’aspect culturel, le Taïwanais ne ressemble pas au Chinois.

Ainsi comment la population taïwanaise peut-elle supporter d’entendre Pékin répéter inlassablement que Taiwan est une province Chinoise comme une autre ? (Le quidam d’en la rue de Pékin en est d’ailleurs intimement persuadé.) Evidemment, pas très bien. Il ne fut donc pas bien étonnant d’assister à une large victoire du parti vert, le parti progressiste, en 2000, qui allait enfin mener Taïwan vers la place qu’elle mérite : un pays indépendant et reconnu.

Mais. Et oui, il y a encore un mais. Mais les mesures qui furent prises ne plurent pas. Et pour cause. Si pendant les 8 ans de pouvoir du parti vert, aucun traité d’indépendance ne fut déclaré officiellement, le gouvernement taïwanais ne cessa de titiller la Chine, à l’image de l’annulation de tout vol direct entre l’ile et le continent. Tant et si bien que les relations commerciales se compliquèrent, et les affaires se firent de moins en moins nombreuses. Conséquence directe : appauvrissement de la population qui le ressent fortement. Ajouté à cela pas mal de « bétises » et d’histoires de corruption ou affiliées, ce furent 8 ans finalement bien difficiles pour Taiwan. En 2008, même si le taïwanais ne se sent toujours pas plus proche du Chinois, c’est poussé par des considérations économiques qu’il remet le parti bleu au pouvoir.

Que dire en conclusion ? Je crois que la situation peut en faire se modéliser très simplement. Taiwan, c’est un noyau périphérique dans une molécule. La force coulombienne créée par les noyaux centraux cherche à repousser ce noyau périphérique, mais les liaisons covalentes créées par la mise en commun d’électrons est plus forte et les empêche de se séparer . Si les électrons grossissent beaucoup, une fusion peut avoir lieu. Mais si on secoue beaucoup la molécule, l’atome périphérique sera éjecté...

Vous m’avez compris ?

Si non, j'ai plus simple:

Tu vends les shots de Tequila à 5 kuais, ça rapproche tout de suite!

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