Le diner est bien rangé,
Au fond de l’université,
Le soleil n’est pas levé,
Il est 5 heures,
Mathieu s’éveille,
Mathieu s’éveille.
La semaine est chaumée,
Les ouvriers sont en congés
Les Chinois dorment à point fermés
C’est l’heure où je vais me lever
Il est 5 heures,
Tsinghua se lève,
Il est 5 heures,
J’ai sommeil.
En retard sur le planning ? Mais c’est une catastrophe ! Car la sortie est minutieusement préparée, l’organisation quasi militaire. Deux réunions de préparation, une répartition des tâches, un briefing détaillé, un road book précis, et une chef qui ne rigole pas. Ça tombe bien, de toute manière, je ne comprends pas leurs blagues.
Après la séquence maintenant classique Vélo-Métro-Taco, c’est à 921 mètres que nous resserrons les chaussures, jetons un dernier regard à la plaine Pékinoise et respirons une dernière bouffée de gasoil. 万宁辛 (Wan Ningxin) est responsable topo. Elle nous emmènera à 2241 mètres d’altitude. Interdiction de doubler. Je me suis fait engueulé quand je lui suis passé devant pour prendre cette photo!
Mais ne croyez pas que le rythme était lent pour le coup. On ne rigole pas avec le planning, il faut à tout prix le rattraper. Pas le temps de prendre le petit dej, les pauses, c’est 3 minutes, et quand la chef déclare 上包 (sac sur le dos !), ce n’est pas comme sur un bateau skippé par Charles, on est instantanément prêt à partir.
La pauvre 徐馨叶 (Xu Xinye), a du mal à suivre, mais elle n’a pas le choix : elle garde le rythme. Quand elle commence à vraiment décrocher, on se partage ses affaires sous les ordres de la chef, et on se remet en route aussi vite. Mais quand elle commence à avoir des crampes, notre chef ne sait plus trop quoi dire… Fier de mon expérience en raid, je l’aide récupérer, s’étirer, et à repartir plus sereinement. Je crois que je me suis fait pardonner mon retard à la réunion de la veille…
On arrive à la fin de la partie la plus difficile, on en profite pour faire une première photo de groupe, et on continue l’ascension sur la crête en écoutant 白鸽, l’hymne de l’association, qui donne des envies de grand air ! Il faut dire que cette chanson est maintenant associée dans ma mémoire avec les images complètement folles des diverses sorties montagnes de l’association. Je rêve maintenant d’Himalaya au son de cette chanson !
Voici le sommet ! Belle dalle, comme d’habitude, pour célébrer les 2188 mètres d’altitude du sommet. Photo magnifique tous ensemble.
Cependant le plus au sommet du coin (deuxième plus haut sommet de la province après 灵山, déjà gravie l’année dernière avec mes amis les Supop) est en face, il nous reste encore un peu de chemin. On passe par un col où nous établirons notre campement, on y abandonne les sacs à dos et les plus fatigués, et on continue jusqu’au sommet, cette fois dans une ambiance beaucoup décontractée !
C’est poussé par le vent qui se lève que nous revenons au camp, on installe les tentes d’autant plus vite que le vent forcit et que le soleil se couche. Le col est orienté Nord-Ouest, Sud-Est, et évidemment, notre position vis à vis du redoutable 西北风 (Xibei Feng, vent du Nord-Ouest) n’est pas favorable. Je ne connaissais alors ce vent que dans l’expression 喝西北风 (boire le vent du Nord-Ouest, signifiant souffrir de faim et de froid), j’ai aujourd’hui fait la glaciale expérience de la réalité de ce vent. Malgré les 4 couches, dont la polaire Quechua et la polaire PierreThomasBinetMontagne, j’ai très froid ! Mon camarade 王文强 est bien moins couvert que moi, mais son pire moment reste à venir… On est obligé de diner sous la tente, autour d’un petit réchaud à l’équilibre précaire, réchaud que nous ne renverserons qu’une fois… Au menu, pates chinoises, enfin ici on les appelle 方便面, les pâtes pratiques…
Après le diner, on se retrouve sous une tente pour chanter et rigoler. Mais 20h approche, les sourires s’effacent, la réunion commence. La chef prend la parole. Elle fait le compte rendu de la journée, et elle n’est pas contente de tout. En particulier des pauvres 宋杨磊 et 王文强 arrivés en retard le matin. Ils baissent la tête, et se font la font démonter. Vraiment ! On ne rigole plus… Parlent ensuite les 2 autres anciens de l’assoce, ils insistent de nouveau… Bon, après on parle des bons cotés aussi, heureusement. 20h30, la réunion est terminée, on oublie tout, tout le monde est copain, tout le monde est content à nouveau, et on admire les étoiles, emmitouflés dans nos duvets. Point de pollution de l’air, on respire, point de pollution lumineuse non plus, les étoiles brillent par centaines, c’est magnifique ! Et puis on va dormir, enfin, on essaye de dormir sous les tentes qui résistent péniblement au Xibei Feng, ce vent glacial.
Je me souviens, ça commençait comme ça
D’abord un peu perdu, par les Chinois réveillés
Où suis-je, quelle heures est-il, est-ce qu’on travaille où pas ?
Alors du bout des doigts se rhabiller
L’odeur du petit déjeuner se glissant sous l’duvet
Un vent glacial semblant forcer la tente
Aujourd’hui est une journée folle
Pas même débutée, nous sommes déjà debout
Dehors, le vent glacial, la brume matinale
Donnent au camp des allures d’Himalaya.
Les cheveux qui s’envolent, vers le soleil levant,
Il manquerait plus qu’un bon chocolat bouillant
Dis-moi, Xibei Feng
Les deux mains dans les manches
Pourquoi je garde au fond du ventre un frisson
Dis-moi, vieille branche
Gardien de mes nuits blanches
Pourquoi ce vent nous gèle à l’unisson ?
6h10, le trait rougeâtre de l’horizon s’embrase enfin et une belle boule bien rouge apparaît ! Quelques photos, puis on remballe le camp, prêt à repartir par un autre chemin, tel les rois mages, comme le dit si bien le lettré Vianney.