dimanche 25 octobre 2009

Questions sensibles

Il est toujours intéressant d’observer la réaction des Chinois aux questions sensibles. Particulièrement avec les profs de Chinois ou les camarades de labo.

Avec ma première professeur de Chinois, mon niveau peu avancé limitait la discussion. La prof était très naïve et se contentait de remettre en cause les valeurs traditionnelles, pas de discussion politique.

Ma deuxième prof était extrême dans son aveuglement. Un jour Julien s’est exclamé que son stylo ne marchait plus, que vraiment la qualité des stylos chinois était à chier. Ce qui est vrai, les produits Chinois sont connus pour être pas chers, mais tout pourris. La prof s’est échiné à lui dire que c’est parce qu’il était vieux (le stylo - il avait deux jours) et que les produits Chinois étaient d’excellents produits. Et quand quelqu’un a parlé du « problème de Taiwan », elle n’a pas compris. « Quel problème ? Taiwan, c’est une province comme les autres ! » Je pense qu’elle ne voyait sincèrement pas le problème.

Notre troisième prof se précipitait pour fermer la porte quand, devant utiliser une nouvelle tournure grammaticale, Julien donnait comme exemple : « La Chine envoie l’armée à Taiwan ». Lui, il connaissait bien le problème, mais savait trop bien qu’il valait mieux ne pas en parler dans cette société. Il nous priait de ne plus utiliser de tels exemples.

Ma prof d’aujourd’hui, la quatrième, est très ouverte. Et elle passe son temps à remettre en cause les actions du parti. Et elle le fait d’elle-même, sans incitation. Un jour elle disait : « j’espère qu’il pleuvra pendant la cérémonie du soixantenaire ! ». Elle nous disait aussi que les artistes Chinois étaient vraiment sans intérêts et que les seuls artistes qui savaient nous toucher par leur création étaient les artistes Taiwanais. Parce qu’ils sont libres et parce qu’ils voyagent, c’est comme ça qu’ils développent leur fibre artistique. Encore un exemple, elle affirme que la génération des années 80 et 90 est une génération perdue, constitués d’inaptes, incapables de quoi que ce soit après leur éducation d’enfant unique, et qu’ils seront donc incapables de tenir les rênes du pays.

Lorsque je lui demande pourquoi on persiste à dire « libération de la Chine » pour signifier la victoire du parti communiste sur le Guomindang en 1949 et la fondation de la nouvelle république, elle me répond que bien sur, il ne s’agit pas d’une libération. La vraie libération est la libération du pays contre les Japonais en 1945, et c’est le Guomindang qui a tout fait. Le parti communiste à l’époque ne servait à rien (Rappelons que la version officielle dit exactement l’inverse) et ne s’est réveillé que durant les 4 ans qui ont suivi la reddition Japonaise.

Mes camarades de laboratoires sont parfois aussi relativement bavards, bien que tous membres d’organisations politiques liées au parti. Je vais éviter d’écrire leurs noms, on ne sait jamais, mais quand je leur demande pourquoi tous les sites internet utilisés par les étrangers sont bloqués alors que les leurs restent accessibles, on me répond franchement que c’est parce que le gouvernement veut contrôler les informations qui circulent sur le net, que si eux, chinois, écrivent quelque chose de douteux sur un sujet sensible, c’est éliminé au plus vite, mais que ce contrôle est trop difficile à réaliser sur les plates formes étrangères, dans des langues que ne maitrisent pas les censeurs du parti.

Quand après avoir discuté longuement de problèmes d’organisation de l’administration d’un pays, je demande à un camarade s’il aime discuter de politique, il me répond « bof. De toute façon, on n’a pas le droit ». Ce même camarade est étonné quand je lui dis que l’image que la Chine cherche à donner d’elle-même à l’étranger est celle d’un nouveau pays développé, apte à discuter sur un pied d’égalité les grands problèmes mondiaux. Il me répond : « non non non, on ne peut pas dire qu’on est un pays développé, seulement en voie de développement. Si notre économie est aujourd’hui très bonne, ce grâce à notre population incroyablement nombreuse, il y a encore énormément d’aspects sur lesquels nous sommes encore très en retard. Notamment technologiquement parlant. Aujourd’hui on ne sait pas faire des avions. Mais on fait très bien des choses simples. » me dit-il en brandissant ses baguettes. « Nous cherchons à apprendre auprès des pays développés pour rattraper notre retard. Le but est d’avoir rattrapé le retard d’ici 40 ans, pour le centenaire de la nouvelle Chine. »

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